Châteaux fantastiques

Hommage est ainsi rendu à tous ceux qui d'un bout à l'autre de la France ont su rendre vie avec acharnement à tous ces témoins muets de notre histoire. Hommage à l'ancienne France également; celle d'avant la Marseillaise, celle des seigneurs turbulents qui virent souvent leurs demeures orgueilleuses mises à bas par le pouvoir central, qui s'appelait souvent Richelieu. Et la série eût pu se poursuivre ainsi longtemps, n'eût été la volonté d'Henri-Paul Eydoux de mettre un terme à une entreprise qui n'eût jamais connu de fin. Peut-être sentait-il quant à lui une lassitude qu'il n'est pas parvenu à nous faire ressentir à travers ces cinq volumes dont je vous ai mentionné les dix-huit ultimes châteaux. Il y en a en tout quatre-vingt treize, dont 79 en France, et certains au Liban, où nos chevaliers du Moyen Age ont réussi une implantation de plus de cent cinquante ans, au temps des croisades. Pour vous donner une idée de la richesse des aperçus qui s'ouvrent devant nos yeux émerveillés, sachez qu'en 1188, Henri II Plantagenêt qui, par son mariage avec Aliénor d'Aquitaine, avait si richement accru ses domaines français, vint assiéger le château de Lavardin. Ce fut une de ses dernières actions, car il devait mourir l'année suivante. Son fils, Richard Cœur de Lion, était présent à ses côtés. Qui ne rêverait devant une telle concentration de noms illustres ? Voyons comment Viollet-le-Duc reconstitue le donjon de Coucy : Viollet-le-Duc l'a établi avec netteté. Comme il formait un cylindre de plus de 100 mètres de circonférence (le donjon évidemment, pas Viollet-le-Duc), on ménagea tout autour, au fur et à mesure de la construction, un chemin incliné en bois (on voyait fort bien les trous de boulins dans lesquels étaient fixée la poutraison) ; cette rampe en hélice n'avait qu'une faible pente sur laquelle pierres et matériaux pouvait être montés sans difficulté sur des chariots. Tous les procédés de construction ont pu être analysés. » Voyez comme vous pouvez visiter les châteaux, dans le temps et dans l'espace, sans quitter votre fauteuil, en attendant d'y aller par vous-mêmes. La page 141 de ce même tome est occupée en entier par un cliché du revers de la façade du château de Montfort, au bas duquel se devinent les croisées d'ogives d'une salle basse. La page 235 montre en contre-plongée l'impressionnante façade de Montaler, surgissant de la végétation, avec sa bretèche au-dessus de la porte, où se tenait bien sûr des bretéchers, ancêtres assurément de notre dessinatrice : ancêtre redoutable, qui vous expédiait à la verticale et par le trou de la bretèche de beaux et gros moëllons à travers le crâne. Bref, de quoi explorer. Peut-on encore se procurer Les châteaux fantastiques d'Henri-Paul Eydoux, j'en doute à vrai dire (encore que), mais en tout cas, si vous en découvrez un, à la brocante ou chez des amis, ou pourquoi pas en passant commande chez les éditions Flammarion, sautez dessus, lisez, rêvez, et revêtez votre armure. Je vous salue bien.

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