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PREMIÈRE VISION D’AJACCIO


Vignette plus que photo, encombrée d’un rebord de proue, première vision d’Ajaccio un matin de novembre, en 15 je crois bien. Il faisait nuit noire, après une nuit blanche… Libre à ceux qui vivent de jouer les blasés. Pour moi c’était fantastique : voir ainsi, première et dernière fois, le port d’Ajaccio comme une écharpe de lumières, globes de vie naissante en éventail. Comme un jaillissement piqueté de trois branches, en éventail sur la droite. Je ne sais quel rempart inefficace mangeant le bas de son grossier raplatissement de fer-blanc.

Une ligne, un globe sur l’eau inidentifiable. Autour, l’eau noire virant bistre, une ligne de quai sous les réverbères, une placette en spatule, un camion civilisé ou deux près de formes entrepositaires. D’autres visions bistres et ocres, parsemées de frai de pilchard roux, une prolongation de maisons sur la gauche, toutes habitées, toutes s’éveillant, avec, par dessus, une grande flaque lumineuse raccord avec la boule reflétée sue l’eau. Peut-être le globe reflet du rectangle en haut. Toute une ville offerte ouverte et mystérieuse par cela même qu’elle semblait ne rien cacher, comme une femme bâillant à sa fenêtre, une vraie, à la 1830. Et non pas ces piaillardes revendicatrices qui font débander. J’ai vu beaucoup de filles corses, minces, maigres et de noir vêtues, héritières de Colomba.

Au loin d’autres lueurs en lignes annoncent des escalades, et j’aspire toute l’aube prometteuse, le grand dépaysement du commis voyageur, l’arrachement au quotidien remplacé par le farniente. Ici les autres travaillent et commencent la journée, doucement, résolument. Bientôt je descendrai à quai cherchant l’hôtel. « Ici c’est le Dauphin, monsieur – le Dauphin ». Mais l’homme ne connaissait pas, d’aucune façon, le beau palace rose impersonnel et rose, à mille mètres sur la gauche.


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