LE PETIT LIVRE DES GRANDES FÊTES RELIGIEUSES

 

Il faut “excommunier” le pécheur afin que seul, dans le secret de sa conscience, il puisse réfléchir sur la dimension étique de ses actes. L'Être éternel appliqua cette règle à Caïn en lui imposant un signe (“ôt”) afin que personne n'enclenchât une mortelle spirale de violence, et en lui infligeant, justement, l'excommunication. Mais cette dernière, comme voie de descente en soi-même, ne saurait être pour autant confondue avec l'expulsion du bouc vers Azazel. Ce rite cathartique sensibilisait les anciens Hébreux aux conséquences de la transgression des règles. En simulant l'exclusion inique du juste, on attirait l'attention des Hébreux sur les crimes dont tous les hommes, sans exception, peuvent se rendre coupables, provoquant inévitablement l'éclatement des sociétés ; il n'existe pas de communauté humaine sans éthique, et la rupture de cette unité entre Dieu et l'éthique provoque la chute de toute société humaine.

Ainsi le passage mentionné du Lévitique, loin d'absoudre l'humanité de ses maux, nous place au contraire face à la responsabilité de l'ensemble de nos actes.


SIGNIFICATION DE YOM KIPPOUR

Il s'agit donc d'une journée consacrée à l'homme en tant qu'être humain qui nous interpelle au plus profond de notre humanité. Il ne faut pas considérer le Yom Kippour comme une occasion de se laver de ses fautes avec légèreté, mais comme le moment d'un vrai et sincère retour à Dieu (la “téchouva”, terme préférable à celui de “repentir”). On observera qu'il faut en agir de même à propos du sacrement


de la confession chez les catholiques ; nous devons nous repentir pour obtenir le pardon. Le juif pratiquant passe la journée à prier Dieu humblement, à la synagogue. Mais sa religion ne connaît pas de confession individuelle ; juste une demande de pardon auprès de chacun de ceux à qui l'on a fait du tort, ce qui est bien plus éprouvant...

Bien entendu ce retour à Dieu implique “une ferme intention de ne plus recommencer”, faute de quoi le pardon n'est pas accordé. Les fautes particulières nécessitant le plus grand pardon de Dieu sont les trois manquements : le premier, à l'amour du Créateur et de la Torah ; le deuxième, à celui du peuple d'Israël ; le troisième, à celui de la terre d'Israël. “Et, par nos efforts, Jérusalem sera sauvée car il est dit : la prière des Justes fait que Dieu sauve Jérusalem” afin de recevoir en héritage la terre d'Israël, “sur les hauteurs du pays”, et de pouvoir “jouir de l'héritage de Jacob, son père” (Isaïe 58, 13-14), ce qui peut s'interpréter comme une promesse de vie future, quoique cette interprétation ne figure pas explicitement dans le Talmud. Certains y voient une promesse divine de possession du territoire hébreu – à condition d'honorer Dieu, sans se borner à son propre intérêt…


SOUCCOT (ou Fêtes des cabanes (des tabernacles)(tentes), “fête des fruits”, “fête de la moisson “ (dans “L'Exode”) ; “époque du réjouissement” (dans les prières)


HISTORIQUE

Cette fête commémore les quarante années d'errance où le peuple d'Israël, échappé d'Egypte, dut se préparer, dans le désert, à entrer en Terre Sainte : “Vous habiterez dans des cabanes pendant sept jours, afin que toutes vos générations sachent que J'ai fait habiter dans les cabanes les fils d'Israël, quand Je les ai faits sortir d'Egypte” (Lévitique, 32, 42-43). Souccot signifie donc “les cabanes”, ou “les tabernacles” (ce sont des sanctuaires itinérants). Mais nous pouvons nous reporter aussi à ce passage de la Bible, relative à la réconciliation d'Esaü et de Jacob : Genèse (33;12) : « Il [Esaü] dit: "Partons et marchons ensemble; je me conformerai à ton pas." Il [Jacob] lui répondit: "Mon seigneur sait que ces enfants sont délicats, que ce menu et ce gros bétail qui allaitent exigent mes soins; si on les surmène un seul jour, tout le jeune bétail périra. Que mon seigneur veuille passer devant son serviteur; moi, je cheminerai à ma commodité, selon le pas de la suite qui m'accompagne et selon le pas des enfants, jusqu'à ce que je rejoigne mon seigneur à Séir." Ésaü dit: "Je veux alors te faire escorter par une partie de mes hommes." II répondit: "A quoi bon? Je voudrais trouver grâce aux yeux de mon seigneur!" Ce jour même, Ésaü reprit le chemin de Séir. Quant à Jacob, il se dirigea vers Soukkoth; il s'y bâtit une demeure et pour son bétail il fit des enclos: c'est pourquoi l'on appela cet endroit Soukkoth. » C'est la fête la plus fréquemment évoquée dans la Bible.


DATE

Cette fête se déroule le 15 du mois de tichri, mais un huitième jour (“chmini atsérèt” ou “jour de conclusion”) et un neuvième (“la joie de la Torah”) prolongent les festivités – en Israël, ils se fondent en une seule journée. Le premier et le huitième jour de cette fête sont fériés, les autres “mi-fériés”, c'est-à-dire qu'il est préférable de ne pas s'y livrer à des activités trop prenantes.

Le 7e jour est appelé “Hochana Raba” (ce qui signifie à peu près “de grâce sauve-nous”) à cause des nombreuses et longues prières que chacun récite pour son salut : c'est le jour du retour vers Dieu où ce dernier vous “scelle dans le livre de la vie” ; avec Roch Hachana et Yom Kippour, c'est le jour où “Dieu est le plus proche du peuple d'Israël”.

Chmini atsérèt”, le 8e jour, Dieu “retient” les fidèles un jour de plus, à l'occasion du pèlerinage à Jérusalem ; mais le soir, les fidèles rentrent chez eux.

Le lendemain, Sim'hat Torah, est la fête de la “Joie de la Torah”.



RITES

LA CABANE

Pendant huit jours, il faut prendre ses repas dans une cabane (la soucca) construite dans le jardin ou sur le balcon. Sa construction s'est faite dès la fin de Yom Kippour ; ainsi l'expiation est-elle immédiatement suivie d'une obligation (“mitsva”). La cabane en question doit conserver un aspect de provisoire et de fragile. Son toit, en particulier, doit être garni de feuillages. Trois parois en présenteront une certaine solidité – quoiqu'il soit obligatoire de tout reconstruire chaque année. Les branches, le bambou sous toutes ses formes, et les palmes, sont les matériaux les plus utilisés. Il doit s'y trouver plus d'ombre que de lumière, et l'on doit pouvoir apercevoir quelques étoiles, afin de rester sous le regard de Dieu. Pourtant certains tolèrent qu'une simple caravane tienne lieu de Soukka.

On prend ses repas dans la cabane, et, théoriquement, on y dort (ou on y somnole...) Mais les hassidim, traditionalistes, même s'ils les y prennent parfois, n'auraient garde d'y dormir, crainte, disent-ils, de “porter attteinte à la sainteté du lieu”. Au moins, dire le kidoush (la bénédiction) et manger un petit peu du repas du premier soir de la fête dans la soukka est obligatoire. Le fidèle y passera le plus de temps possible, comme dans sa propre maison, y compris avec des meubles. Et l'on y étudie la Torah.

S'il pleut ou s'il fait trop froid, mieux vaudra toujours sacrifier le rituel aux obligations de santé ; ce qui est toujours le cas dans la religion juive : les malades sont dispensés de dormir dans la soucca. Inutile d'ailleurs de s'y forcer : Dieu ne nous en aura aucune reconnaisance supplémentaire !


LE LOULAV

C'est une branche de palmier-dattier, donnant son nom à un faisceau que l'on tient dans sa main, comprenant donc, outre cette branche, une autre de cédrat “étrog” (proche du citronnier) tenu celui-là dans la main gauche, trois de myrte “hadass” et deux tiges de saule de torrent ou “arava” (Lévitique, 23, 40). Tous les jours, ces végétaux seront agités en direction des quatre points cardinaux,vers tous les coins de la soucca, ou à la synagogue, autour de laquelle se déroulent des processions. Puis vers le haut, vers le bas, en récitant des prières qui demandent à Dieu l'abondance et la prospérité.


LECTURES ET BÉNÉDICTIONS

Le chabbat de la semaine du Souccot, on procède à la lecture du Livre de l'Ecclésiaste (Vanité des vanités...).

Avant d'entrer dans la soucca, on dit : “Je suis prêt et invité à accomplir la mitsva (“obligation”) de la soucca, comme me l'a ordonné le Créateur, haréni moukhane ou mézoumane lekayème mitsvate soucca kaachèr tsivani baboré...” Et en y pénétrant, on invite Abraham, Isaac, Jacob, Moïse, Aaron, Joseph ou David (chacun a droit à une journée particulière). Puis il faut réciter le verset : ba souccote téchvou chivéâte yamim, “dans les cabanes séjournez sept jours”.

Le rituel complet, si l'on veut s'y soumettre, est long et très minutieux. Pour finir on boit le vin ; on fait au moins la bénédiction (“motsi”) sur un morceau de pain, et après l'avoir mangé, on récite le “birkat hamazone” (action de grâces).

Chaque soir, après avoir récité le “Shema Israel », on demande à Dieu d’étendre “la soucca de sa paix sur son peuple.”


SIM'HAT TORAH

Ce jour-là, les croyants sortent solennellement les rouleaux de la Loi (Sifre Torah) ; il est procédé à la lecture des derniers versets de la Torah, puis on la recommence dès le début : “Béréchit... Au commencement (Dieu fit le ciel et la terre)” Puis on danse dans la synagogue même, en processionnant autour de la bimah (autel), tenant les rouleaux de la Torah dans les bras. Même les enfants sont autorisés à danser autour des rouleaux de la Torah, sous un grand voile au-dessus de leur tête “pour les inclure dans la communauté festive”. C'est la Torah elle-même qui danse avec ceux qui la respectent, tout enveloppée car c'est le temps non pas de l'étude, mais de la réjouissance, comme l'étreinte de la communauté avec son propre corps...


SIGNIFICATION DE SOUCCOTH

La cabane en plein air symbolise évidemment la protection divine qui s'exerce jusque dans le dénuement et sous la menace des intempéries. Et justement, la fête de souccoth intervient au moment où le temps très souvent se couvre, tandis que les autres ont tendance à rentrer chez eux pur s'abriter...


FÊTE DES RECOLTES

Dt 16, 13 : « Quant à la fête des Tentes (hag ha-Soukkot), tu la célébreras pendant sept jours lorsque tu auras rentré tout ce qui vient de ton aire et de ton pressoir.” Donc à l'origine, la joie que procurait aux paysans d'Israël la fête de Souccot était surtout provoquée par la période des récoltes. Comme dans tous les pays, ces travaux relatifs à l'agriculture, en particulier la cueillette des fruits, s'accompagnaient de festivités. Cependant, pour éviter que celles-ci ne devinssent l'occasion de débauches, le texte biblique nous met en garde : même en cas de récoltes abondantes, c'est “devant [n]otre Dieu” que “[n]ous [n]ous réjouir[ons]”, certains allant même jusqu'à affirmer que de tels excès, justement, provoquèrent la destruction des deux temples d'Israël.

C'est pourquoi les prêtres ont chargé cette fête d'une

SIGNIFICATION RELIGIEUSE

Tous les rites, d'abord, rappelleront la vie au désert des ancêtres hébraïques. Les quatre espèces végétales prescrites dans la Bible peuvent s'interpréter comme un symbole des différentes classes sociales du peuple d'Israël, qui manifestent ainsi leur unité en cette occasion. Il y a d'autres interprétations populaires : le palmier, c'est le corps de l'homme ; le cédrat, son cœur (lieu de l'intellect, pour la Bible) ; le myrte, ce sont ses yeux, et le saule, ses lèvres - “tout ce qui pourrait induire l'homme à pécher”. Ou bien, ce seront quatre caractères : le cédrat évoque le juste ; le palmier sera le juif qui se borne à la lettre de la Torah, le myrte l'homme qui agit sans la connaître – et le saule, sans fruit, sans parfum, symbolise l'ignorant... “Que ces quatre espèces d'hommes se rassemblent et que chacun fasse expiation pour l'autre. »

Mais la joie doit régner ! C'est même une mitsva, une obligation : “Tu te réjouiras pendant la fête”, Deut. 16, 14 – afin de célébrer la protection divine. Celui se prend au sérieux (“ces choses-là ne sont pas de mon rang”) sera blâmé. Car "le roi David lui-même saute et fait des pirouettes devant Dieu".»

La cabane présente dans le toit des ouvertures, afin de nous mettre plus évidemment encore sous le regard de la divinité. Le caractère provisoire de cette construction nous enseigne aussi à ne nous attacher à rien de matériel, car notre existence à nous aussi est provisoire ; la vie terrestre n'est qu'un épisode - d'où la lecture du livre de l'Ecclésiaste... C'est Dieu qui est notre seul abri. Notre maison de briques et de pierre ? Elle aussi périra. Tel est le sort commun bien sûr de toute l'humanité, mais plus particulièrement du peuple juif, qui a souvent dû, au cours de son histoire, déménager en catastrophe, mener une vie errante et dépourvue de sécurité matérielle. Or seuls Dieu et la Foi sont éternels – ce qui doit nous rassurer sur notre sort. Les croyants voient dans le caractère provisoire et incessamment renouvelé de cet habitat, symbole de la perpétuelle diaspora du peuple juif, une occasion de se réjouir de l'immortalité du peuple élu, qui résiste à tout.

Se trouve conséquemment sollicité le sentiment de fraternité à l'égard de tous les errants de la terre, et de tous ses passagers. Tout hôte doit être traité avec bienveillance. Le non-juif est le bienvenu. La fraternisation juive implique un rapprochement avec les autres nations. Lorsque le temple était débout, l'on sacrifiait 70 taureaux, symbole des “70 nations”. Et cependant, Souccot est peut-être la seule fête qui n'a pas été récupérée par le monde chrétien. (Pessah fut rapproché de Pâques, Chavouot de la Pentecôte, Pourim du Mardi Gras, et même Hanouka de Noël. Mais la fête de Souccot reste à la fois fraternelle et spécifiquement juive.)

Sur le plan personnel, il s'agit de se ramener soi-même progressivement dans un sentiment d'amour et de reconnaissances universelles ; progressivement en effet, car nous devons considérer nos faiblesses et ne pas nous désespérer de n'être pas des saints. Il ne s'agit donc pas d'une illumination surnaturelle qui nous transporterait dans un état extatique : “Un juif admet les épreuves d'une vie fragile et il continue” - l'amour de Dieu lui aussi “sait attendre”.

Le temps de Souccoth doit être mis à profit pour retrouver le chemin de notre intériorité, dans le calme, et le sentiment de cette présence divine en chacun de nous.



PESSAH

le passage” (par-dessus)(anglais : passover”) (français : la Pâque juive)

-zmann hérouténou, “le temps de notre libération”.

  • hag ha matzot “fête des azymes”


GENERALITES

Les fêtes de la Pessah sont également célébrées durant huit jours, à partir du 15 du mois de nissan. C'était également une fête “de pèlerinage” (à Jérusalem). Il s'agissait de fêter le printemps, au moment de récolter l'orge.

Historiquement (même si l'Histoire demeure à ce sujet dubitative) et religieusement, Pessah commémore la sortie, pour le peuple hébreu, de son esclavage d'Egypte.


DATES

Le calcul de la date de Pessah reste primordial, car c'est d'après elle que l'on fixe la célébration de plusieurs fêtes.

En “galout” (terre d'exil), on célèbre cette fête avec une particulière intensité les deux premiers jours.


LITURGIE

A partir du second séder, on commence à compter sept semaines, à l'issue desquelles se célébrera la Pentecôte juive ou “Chavouoth”. On se rend quotidiennement à la synagogue, pour remercier Dieu de la libération accordée au peuple juif. L'assistance récite le hallel (“la louange”) : les Psaumes 113 à 118, le 114 évoquant en termes explicites la sortie d'Egypte, il y a environ 3500 ans. De plus en plus d'historiens remettent en cause l'existence réelle de cet épisode ; nous répondrons que depuis le temps qu'Israël célèbre Pessah, elle lui a en quelque sorte conféré une réalité interne, à tout le moins symbolique. Les dogmes de toutes les religions sont susceptibles d'interprétations variées. “Être 

juif”, dit à peu près le philosophe Memmi, “c'est aussi partager en commun un certain imaginaire”, une certaine culture.

Le Cantique des Cantiques fait également l'objet d'une lecture solennelle en raison de la célébration du printemps qui y figure. Dans les synagogues ashkénazes, le “yizkor, ou “office de commémoration », se lit en public le dernier jour de la fête.

COUTUMES, FESTIVITES

La Haggada (ensemble des textes rabbiniques, surtout palestiniens, fondés sur la Torah) rapporte les exégèses et les interprétations homilétiques des rabbins de l'Antiquité. C'est l'origine même de la vie littéraire juive. Elle relate cette miraculeuse délivrance ; c'est le manuscrit le plus abondamment recopié, reproduit à travers les âges. Ce récit constitue en effet le fondement de la conscience juive. C'est une fête familiale, autour d'une table abondamment servie ; tous les convives tient à disposer d'un texte sacré bien à lui, afin de participer activement au rite.

Afin que le repas du séder soit préparé de façon rituelle, chaque membre de la famille se livre à une minutieuse recherche à travers la maison ou l'appartement : il ne doit pas y subsister la moindre parcelle de levain, d'où un nettoyage complet (certains dissimulent les miettes dans dix sachets de papier – que les enfants doivent retrouver !) Ces débris peuvent être détruits, voire fictivement vendus à un non-juif... Il est parfaitement permis de consommer du riz, quoique les juifs marocains, traditionnellement, s'en abstiennent. Les ustensiles de cuisine en contact avec le haméts devront être “cachérisés” - par l'eau bouillante ou par le feu. Pour les resquilleurs : il ne suffit pas d'aller habiter pendant la fête à l'hôtel ou chez des non-croyants... Les obligations de Pessah ne sont levées que si l'on est absent de chez soi depuis au moins trente jours !

La famille dispose au milieu de la table une coupe de vin, sur laquelle on récite la bénédiction du kiddouch ; elle est appelée “coupe d'Elie”, le prophète, précurseur du Messie, étant censé venir participer à cette purification de la maison. Personne ne verrouille la porte, pour accueillir celui qui se présentera : “Celui qui a faim”, disait-on en Tunisie, “qu'il vienne”. Tout un scénario immuable pourra alors se dérouler, en quinze étapes ou “montées”, scandées par quinze psaumes. Comme il est particulièrement détaillé, mieux vaut se procurer un exemplaire du Choul'hane aroukh (“la table dressée”), qui résume l'ensemble des prescriptions, que l'on trouve dans toutes les librairies juives.

Toute nourriture comportant du levain est appelée “hamets” (pain, gâteaux, pâtes alimentaires) ; en effet, le soir de l'Exode, aucune famille n'avait eu le temps de faire lever le pain 

que chacune se cuisait personnellement, mais emporta la préparation telle quelle, sans adjonction de levain. On ne doit donc pas en consommer durant les huit jours de Pessah.

Noter que les fils aînés, ainsi que tous ceux qui veulent les rejoindre dans cette coutume, doivent jeûner en souvenir de la tristesse provoquée par la mort des premiers-nés d'Egypte, dernière des plaies du même nom, après laquelle Pharaon autorisa, bien malgré lui, les Hébreux à quitter leur terre d'exil.

Le soir du repas de séder (qui signifie “ordre”, à savoir celui du déroulement de la cérémonie familiale, au premier soir de Pessah), tout le monde consommera de la matsa, c'est-à-dire du pain sans levain, ce qui est le contraire du hamets. Il faut en manger au moins trente grammes. Quelques produits alimentaires sont aussi consommés : fruits et légumes frais, poissons, eau minérale naturelle. On boit aussi quatre coupes de vin (ou de jus de raisin casher), à différentes étapes de la célébration, pour indiquer les quatre étapes de la libération du peuple juif (Ex. 6, 6-7) – à moins qu'il ne s'agisse là encore d'un rappel du sang versé des nouveaux-nés d'Egypte.

Le Maggid est le Récit de la libération. Le plus jeune des enfants pose “les quatre questions” : “En quoi cette nuit est-elle différente de toutes les autres nuits ? Pourquoi cette nuit ne mange-t-on que des azymes ? Pourquoi cette nuit ne mange-t-on que des herbes amères ? Pourquoi cette nuit, alors que toutes les autres nous mangeons soit asssis soit couchés, sommes-nous accoudés pour manger ?” (sur le coude gauche, comme des hommes libres...) Alors, le père de famille répond aux questions, en rappelant les circonstances de la sortie d'Egypte : par exemple si l'on mange du maror (de la laitue, du chèvrefeuille, de la chicorée), c'est en souvenir de l'amertume de l'esclavage – mais le harosset (rappelant le mortier d'où l'on tirait les briques) en atténue l'amertume : on trempe les herbes dans une pâte de fruits ou une compote ; en Orient, le harosset se compose d'amandes, de dattes ou de figues – en Europe, de pommes et de noix – chez les Portugais, d'amandes, de pommes, de raisins, d'épices et de vin. Les judéo-espagnols ajoutent du raisin sec trempé dans le vin ; au Surinam, on ajoute même de la noix de coco !

On mange aussi parfois un œuf dur, commémorant le deuil de la destruction du temple. Autrefois, le commandement essentiel était de faire le sacrifice de l'agneau pascal, le 14 (Pleine Lune) du mois de Nissan, et de le consommer le soir-même ; un os grillé d'agneau figure sur la table du séder. Le père de famille rappelle ensuite le sacrifice de Pessah en souvenir du “saut”, du “passage” que l'ange de la mort accomplit au-dessus des maisons juives (au jeu, on dit : “je 

passe !”) - dont les premiers-nés, eux, furent épargnés. Après le repas, qui fait partie intégrante de la cérémonie, le séder se conclut autour de chants symboliques. Chacun loue l'Eternel “qui nous a sortis de l'esclavage d'Egypte, nous a donné la Torah et nous a offert la terre d'Israël”, et l'on prononce la formule immémoriale “L'an prochain à Jérusalem” - la chana ha baa bi Yérouchalaïm – en Israël on ajoute ha benouhay, “qui a été reconstruite”.


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