Turpitudes en France profonde

 Le médecin Maatz, pour sa part, exerce en contrebas d'un de ces villages dominé par l'axe routier
 départemental Salobez-Moncap-Faucon. Le pharmacien  occupe un recoin humide en contrebas 
place d'Arbrissel (1047-1117). Tous deux se renvoient mutuellement leur clientèle
 parmi les catarrhes et les courants d'air d'une agglomération ingrate. Entre les deux se situe 
la Salle des Fêtes au fond d'une impasse croit-on jusqu'à l'étranglement d'un sentier en hernie,
 mal remblayé de tuiles, mène le promeneur sous le nez des vaches et les barbelés. 
Sept cents âmes pourtant à Moncap, des  rues nombreuses, murs et pavés noirs. 
CHAPITRE DEUX - CONFIDENCES NON DE FEMMES – PREMIER DEVOIEMENT Ne pensons pas que deux confidentes se bornent à leurs culs ; asexuées comme elles se vantent
 d'être,  les femmes ont pourtant part à l'expérience humaine. Nous évoquons ici, loin
 des métropoles, une prostituée en rupture de passes et son amie Annemarie Mertzmüller, 
strip-teaseuse (une boulangère exerce aussi ses talents à Moncap, mais n'offre pour l'instant
 que peu d'intérêt).  Le piquant de l'affaire est que la maîtresse du marchand de chaussures 
et celle du médecin sont amies d'enfance : Annemarie Mertzmüller offre en scène sa nudité 
dans un esprit de compassion bouddhique, et Karine Bost, ex-boulangère, se vendait en
ville pour 1 sol 3 liards. 
 Mais les deux amies se parlent de sexe le moins possible. Leurs rencontres se tiennent 
dans un salon  de thé old fashion du quartier piéton d'Agen. Comme elles sortent d'une vie 
mouvementée,  elles comparent leurs voyages. Elles n'ignorent pas qu'elles possèdent un homme,
 sans se douter pourtant que ces deux-là sont frères, de noms différents mais de mère unique
 et lorraine. Elles connaissent les itinéraires Bordeaux-Saintes, Saintes-Périgueux-Agen, 
et s'échangent recettes  et adresses de routiers : « d'excellentes cantines, mais tellement 
bruyantes ! » - Mertzmüller en est bien d'accord. Puis elles vont chasser plus loin. 
Mentionnons aussi Châteauneuf-en-Gévaudan : au pied de cette place forte aujourd'hui 
renfrognée dans la neige  se trouve la chapelle abandonnée de Robert du Plessis-Bertrand,
 que les livres d'histoire ne mentionnent plus ; mais nos demi-frères y découvrent un club
 de chasse, où se rencontrent des paysans traditionnellement madrés, aux yeux non moins finauds, 
tous parfaitement  inoffensifs et reposants tant qu'il ne s'agit pas d'héritages (nous disons 
"Châteauneuf-en-Gévaudan", nous excusant à l'avance auprès de l'équipe municipale, 
qui devra bien se résoudre à ce que  l'on ne parle pas uniquement de sa commune en termes
 de dépliants touristiques). 
 Qu'est-ce que l'amitié entre femmes, dans l'imaginaire de l'homme ? une possibilité
 d'infinies consolations après tel acte sexuel rude ou manqué, l'homme  n'offrant souvent 
d'autre choix que la force du soudard ou la flaccidité de l'ivrogne ? ...Il existe à l'écart de la route
 un hôtel dans la plaine, ou plutôt sur le plateau, vers le sud. Là s'est réfugié un homme,
 pour l'instant anonyme. Il a descendu à même la neige un chemin creux, cherchant en vain 
vers le nord la chapelle médiévale si encensée jadis par son instituteur, mais situé 
à l'opposé, vers la Tarenne, où sa dépouille reçut des Bavarois les clés de la ville. 
Son corps se décomposa sur les chemin de Normandie, et l'on dut procéder
 à une totale éviscération, ébullition, etc. 
 « Quelle température fait-il ? » Question posée ce jour même dans le Café du Pote-Aymond 
 à Châteauneuf, face à l'église de pierre noire.
 - Moins cinq.
 Cette réponse indigne la buraliste : "Moins dix ! - Je ne crois pas". La voilà qui se met
 à prendre aigrement à témoin ses trois clients, sur son isolement, sur ce plateau pourri 
coupé de tout -   on les voit tous défiler sur l'autoroute en  bas, y en a pas un qui monterait 
s'arrêter ici - "Madame, vous habitez un pays que vous ne méritez pas". Parfois, la tenancière
 du tabac prend trois semaines de congés : à Limoges, à Clermont, à Bordeaux. 
C'est là que Geneviève Desjols, buraliste, arrondit sa bourse sur le trottoir 
et se fait relayer là-haut par une collègue. L'inconnu couche à la sortie du bourg, 
Hôtel du Dogue, surchauffé, confortable ; il se change, enfile son veston de prêtre à col romain, 
descend dîner. 
 Deux couples à la table voisine : Pascal Maatz et son ex-boulangère 
prostituée repentie, (Karine) et la meilleure amie de celle-ci, Annemarie Mertzmüller, 
de noble famille schwartzwaldienne,  avec son godassier François dit Frank Nau. 
Ce quatuor boit et s'agite beaucoup. L'ambiance est à la baise après le dessert. 
Revenu  dans sa chambre, l'anonyme espion, gris froid coupé en brosse, entend 
par la porte ouverte de sa salle d'eaux les échos d'un coït acharné.
 Lui-même se masturbe deux fois au-dessus du bidet, pour éviter les commentaires 
des femmes de ménage il est malade çui-là tout seul la nuit et des traces dans les draps,  
soigneusement grommelés à haute et intelligible voix. 
 Dialogue des  maîtresses au petit-déjeuner : 
 « Qu'est-ce qu'il m'a mis hier soir !" (très bas) - et toi ? 
  - Il n'a pas pu, il était trop soûl ! 

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